Hell Driver de Patrick Lussier

Amber Heard dans Hell driver de Patrick Lussier © Metropolitan FilmExport

Nic Cage, ce héros. Peigné comme un balai de crins tendance méchouilles jaunâtres, revoilà notre bien aimé Nicolas Cage se consumant encore une fois, comme lui seul en a le secret, dans une série B virevoltant allègrement vers le Z.

Et en 3D, ça dépote gravissimo, le réalisateur — Patrick Lussier, responsable du remake de Meurtres à la St Valentin en 2009 — nous balançant tout le rayon accessoires dans la trogne dès que le script, minimaliste, lui en offre l’opportunité. Et dieu sait qu’elles ne vont pas manquer. Car pour sûr, ici, ça ventile et pulvérise dans tous les coins, et chaque occasion est trop bonne pour ne pas exploiter le système jusqu’à la nausée.

Le script est shakespearien en diable (pour le bruit et la fureur, fichtre oui !), et à en juger par la mine déconfite et torturée de John Milton/Nic Cage, on se dit qu’il n’a pas filé en loucedé du royaume d’Hadès pour nous convier à une partie de franche rigolade, tout empressé qu’il est d’empêcher une bande d’illuminés adorateurs du démon — deux pelés, trois tondus et 4 nichons à l’air, imaginez un peu l’infernal sabbat — menée par Billy Burke*, de sacrifier un nouveau né au grand Satan dans le but d’apporter mort et pestilence sur cette terre etc etc.

Et ce, en entrainant dans sa quête éperdue (il sera permis de ricaner bassement lorsque l’on en connaîtra la raison) une charmante blonde très court vêtue — la ravissante Amber Heard qui dilapide ici un talent certain et que l’on a hâte de voir dans le dernier Carpenter** — qui n’hésite pas à flanquer une branlée à tout mal éduqué qui ne la respecte pas. En clair, les ¾ du casting.

Dans le rôle du « Comptable » — et parodiant gravement un Mr Smith shooté au lexomil — William Fichtner donne l’air de s’amuser comme un petit fou, tout en sachant raison garder cela va de soi. Deux expressions au compteur, max. Et un regard qui pétille par inadvertance. Ayant comme qui dirait un train de retard. Puisqu’arrivant tout droit de l’au-delà dans un impeccable costard trois pièces (ça, c’est vraiment l’enfer), il a donc quelque excuse à être autant déphasé.

Sans compter que son attitude pince sans rire offre un excellent contrepoint au jeu halluciné de l’inénarrable Cage.

Ce dernier, semblant à moitié groggy durant une bonne partie du film — et nous offrant en bonus une réinterprétation toute en finesse de Terminator notamment au niveau de la pupille gauche — continue subrepticement l’exploration de sa psyché en une lente et perpétuelle analyse, toutefois traversée d’extraordinaires éclairs de démence. Le comique de la situation nait du sérieux sans faille — y compris dans une scène de coïtus non interruptus pas piquée des hannetons — avec lequel l’acteur incarne son personnage de damné voué à l’expiation éternelle.

Hors donc, si l’on souhaite se détendre et que l’on a auparavant abandonné ses neurones au vestiaire, que l’on aime les grosses cylindrées (un David Morse très fatigué joue le garagiste), les poursuites de voiture rocambolesques à la Cours après moi shérif — et que l’on n’est pas trop sujet aux migraines intempestives, rapport aux inconfortables lunettes — on peut prendre un plaisir foncièrement coupable à cette virée de l’enfer, fun et sans conséquence.

* On imagine sans peine un jeu de mot bien pourri, vu le charisme de canasson crevé du dénommé.
** Envie d’autant plus renforcée que l’on voit apparaître Tom Atkins dans le rôle d’un capitaine de police décérébré (pléonasme) et vengeur.

A lire toutes affaires cessantes sur Les Inrocks : Nic Cage ou le « chamanisme primitif ».

Hell driver/Drive angry de Patrick Lussier_2011
avec Nicolas Cage, Amber Heard, William Fichtner, Billy Burke, David Morse, Katy Mixon, Christa Campbell et Tom Atkins