Sur les berges de l’ennui. Que les érotomanes se rassurent. Certes, le titre du dernier opus de Manuel Pradal fait écho à la toile d’Edouard Manet vite découpée bien emballée par le jeune héros du film mais Vahina Giocante — en faillible gardienne des lieux kidnappée derechef — ne cache rien de sa superbe anatomie dans des scènes de bain et de sexe aussi nombreuses qu’inutiles, cherchant sans doute sous cet attrayant vernis à masquer la vacuité d’un scénario prenant l’eau de toutes parts.
Deux frères bientôt orphelins vivent en autarcie sur une péniche dont ils espèrent hériter. La première scène, d’un goût douteux, est explicite : l’aîné (Nicolas Duvauchelle qui ne se renouvelle guère avec ce rôle de voyou au cœur tendre) partage tout avec le cadet (la révélation Steve Le Roi qui fait preuve d’un vrai tempérament en interprétant un adolescent à l’orée de son indépendance sexuelle) qu’il embarque dans une fumeuse histoire de vol de tableau pour des gangsters d’opérette.
Passe encore le larcin parfaitement rocambolesque du fameux Manet exposé au Musée d’Orsay si une comédie débridée ou un thriller énervé s’en était échappé. Las. Cette fuite en péniche des frangins encombrés d’un chef d’œuvre invendable et de la jeune femme — définie sur le champ en termes exquis — qu’ils ont enlevée ne fait qu’accumuler des poncifs au rythme de dialogues affligeants. L’artificialité est reine et l’ennui s’installe insensiblement au gré des rencontres.
Du reste, les deux acteurs principaux peinent à incarner des personnages sans profondeur aucune et cette pauvrette de Vahina Giocante frôle souvent le ridicule, encombrée d’une sensualité dont elle semble ne savoir que faire.
Les autres protagonistes (un vieux couple vivant sur les berges, un duo de gangsters bêtes et méchants) n’ont guère plus de chance d’exister dans cette histoire qui ne paraît avoir été tournée que pour exalter la beauté de la belle. Seul, Jacques Spiesser, en père navré de l’inconsciente, apporte un minimum d’épaisseur à son apparition.
Et si l’on songe à d’autres river movies où dérivaient les passions amoureuses, la simple évocation de la fureur poétique d’Au voleur de Sarah Leonor sorti l’année passée suffit à définitivement envoyer La blonde aux seins nus par le fond.

La blonde aux seins nus de Manuel Pradal_2010
avec Vahina Giocante, Nicolas Duvauchelle, Steve Le Roi, Caroline Raynaud, Paul Schmidt, Jacques Spiesser, Christian Bouillette, Mireille Franchino, Jo Prestia et Sacha Bourdo