Wanted de Timur Bekmambetov

James McAvoy & Angelina Jolie dans Wanted : choisis ton destin de Timur Bekmambetov © Paramount Pictures France

Le père, le fils et Angelina Jolie. L’ennemi est bête : il croit que c’est nous l’ennemi, alors que c’est lui ! J’en ris encore ! Ainsi s’exprimait Pierre Desproges dans son Manuel de savoir-vivre à l’usage des rustres et des malpolis.

Alors voilà, Dieu existe et il s’appelle Terence Stamp. Il vivait tranquillement dans un monastère reculé en compagnie d’un métier à tisser et y déchiffrait les identités des affreux à abattre pour que notre joli monde tourne plus rond… Survint Morgan Freeman qui se dit qu’après tout, lui aussi tricoterait bien la destinée des humains. Surtout que le rôle de Dieu il connaît, ayant survécu tour à tour à Jim Carrey et Steve Carrell dans Bruce almighty et Evan almighty de Tom Shadyac, c’est dire s’il est doué…

Il n’est pas précisé dans le générique ce que les scénaristes de cet ovni (inspiré d’un comic book co-signé Mark Millar et J.G. Jones) ont inhalé lors de leurs séances de travail, mais il va sans dire que le Morgan a certainement eu droit lui aussi à une sacrée dose de poudre de perlimpinpin. La scène où il déclare, sérieux comme un pape, à un James McAvoy sous antidépresseur, qu’il est à la tête d’une confrérie d’assassins appartenant à l’axe du bien (il a manifestement compulsé pour la préparation de son rôle son petit Bush junior illustré) et spécialistes de frappes préventives ordonnées par un vieux tapis est un enchantement pour les zygomatiques.

Aux fins d’éviter que sa nouvelle recrue n’ait quelques scrupules, il lui fourgue son arme de séduction massive, soit Angelina Jolie (deux expressions faciales au compteur) en Jessica Rabbit anorexique. La belle servira au pantin de mère, de cible, de sparring partner et lui roulera éventuellement une pelle pour achever de le convaincre. Et ça ne rate pas ! Un clin d’œil de la rouée et vlan ! le voilà empapaouté en beauté. Il suffit ensuite de raconter au benêt que le malfaisant qu’il prendrait en pitié risquerait bien dans un proche avenir de tirer son carambar à un bambin pour que l’ex-neurasthénique des open spaces défouraille à tout va…

Le fringant James McAvoy a un talent bien à lui pour jouer les andouilles (déjà, dans Le dernier roi d’Ecosse/The last king of Scotland de Kevin Macdonald_2006, il fallait découvrir son visage incrédule puis son regard affolé quand le freluquet se rendait enfin compte de la folie de l’Amin Dada — Forrest Whitaker dans un grand numéro d’ogre infantile)… Et il est tout aussi crédible en ersatz de Chow Yun Fat, malgré un physique somme toute fort discret.

Après le succès foudroyant de Nightwatch, foutraque kaléidoscope de compétences diverses et variées très clipé MTV, Timur Bekmambetov s’est vu manifestement offrir, en sus d’un aller simple pour Hollywood, la trilogie des Matrix et un best of des œuvres complètes de George Lucas. Son film, parodie délicieuse de Star Wars, rythmé façon Tex Avery sous acide, est top con, mais diablement jubilatoire. Sous le fallacieux prétexte de livrer un plaisant blockbuster estival, le petit sournois se permet de tendre à ses nouveaux amis américains un miroir terrifiant à peine déformé où s’invitent culture pop-corn, retour outrancier aux valeurs familiales, vulgarité bling-bling et politique internationale avariée.

Nonobstant, sous sa panoplie de BD décérébrée, Wanted est surtout une remarquable métaphore sur l’endoctrinement religieux. Et l’on peut même y décrypter comme une discrète relecture du combat actuel pour la présidence des Etats-Unis, où le challenger James McAvoy serait le clone idéal d’un Barack Obama cherchant à reprendre les rênes d’une nation gangrenée.

Wanted : choisis ton destin/Wanted de Timur Bekmambetov _2008
avec James McAvoy, Angelina Jolie, Morgan Freeman, Thomas Kretschmann, Terence Stamp, Common