Le monde tel qu’il est, mythomanies enfantines. Est-ce le manque évident de charisme d’Edouard Baer plutôt habitué au rôle de funambule sympathique qui nous offre ici une interprétation monolithique, au scénario plutôt mince et sans véritables enjeux, à l’apparition d’Alain Chabat, le producteur, en professeur d’anglais (pas très discret le clin d’œil), mais on a du mal à croire à cette histoire de veuf poursuivi par d’hypothétiques tueurs et qui enseigne à son fils l’art du close-combat.
Auteur d’un intéressant premier long métrage, Les mauvais joueurs, Frédéric Balekdjian perd peu à peu le fil de son histoire, tout occupé qu’il est à filmer son vrai sujet : son fils Anton. Le bonhomme a d’ailleurs une sacrée présence et tient la dragée haute à son illustre partenaire.
Et c’est ainsi que surgit sous l’apparente étude d’un cas pathologique (le père est-il atteint de paranoïa aiguë, en proie à une culpabilité mal assumée, victime d’un délire de la persécution ou réellement la proie d’une bande de tueurs sans scrupule, le réalisateur semble finalement s’en moquer autant que le spectateur), l’angoissante aventure de l’émancipation des lardons.
Les rituels cruels de l’enfance sont brillamment décrits et font finalement apparaître comme un monde parallèle, empli de gamins toujours à la limite de la petite délinquance, livrés à eux-mêmes, victimes plus ou moins consentantes de familles recomposées ou mono-parentales.
Finalement, Un monde à nous est bien plus opaque et profond qu’il ne semble de prime abord. Ce n’est pas nécessairement un objet aimable et l’inaboutissement du scénario apporte son lot de frustrations (Simon Abkarian prête sa voix par le biais d’une conversation téléphonique mais ne se manifeste pas à l’écran).
Cependant, en peignant l’amour inconsidéré d’un fils pour son père, Frédéric Balekdjian excelle à cerner les mystères et la grâce pataude des années pré-adolescentes.

Un monde à nous de Frédéric Balekdjian_2008
avec Edouard Baer, Anton Balekdjian, Philippe Lefebvre, Nassereba Keita, Mariame Gaye, Julien Frison, Jean-François Stévenin