Les dingos sont de sortie. Un homme à l’air effrayé (Martin Landau nettement plus allumé que dans Cosmos 1999) pénètre dans un snack bar. Le cuisinier s’est fait la tête de Donald Pleasence et, un grand hachoir à la main, se précipite pour l’ouvrir en deux le prenant pour un quartier de bœuf. Martin pousse des cris d’orfraie et se réveille. Ça n’était qu’un mauvais rêve. Ouf !
Reprenons. Dwight Schultz (le « Looping » de L’agence tous risques, version télé), le cheveu rare mais en bataille, arrive à l’hôpital psychiatrique où il doit prendre ses nouvelles fonctions. La réceptionniste l’informe qu’il ne pourra pas voir le directeur car ce dernier est invisible, l’épithète étant à prendre au premier degré. Tête de Dwight. Le médecin arrive c’est Donald Pleasence. Il n’a pas de hachoir à la main mais cet original, adepte de médecines parallèles et de traitements de la maladie mentale fort peu orthodoxes, peut éventuellement se retrouver à fumer quelques substances illicites. Ce n’est pas un mauvais rêve, le film peut débuter.
Martin est fou (sans blague) et partage sa chambre avec trois autres comiques dont l’un ressemble à s’y méprendre à Jack Palance. Effrayant.
Son truc au Jack c’est de vérifier que l’installation électrique marche bien. Car il n’y a pas de barreaux aux fenêtres certes, mais qu’un « patient » tente d’en ouvrir une et tout un système de verrouillage automatique se met aussitôt en branle. Pour travailler dans un cadre agréable tout en faisant des économies de personnel, c’est idéal.
Sauf en cas de black-out.
Et comme de bien entendu, ce qui doit arriver, survient. Et notre quatuor — persuadé que le nouveau thérapeute a assassiné son prédécesseur pour lui piquer sa place — de s’échapper avec une mission, rendre une visite de courtoisie sanglante à Dwight et lui faire expier son crime odieux.
Alone in the dark — œuvrette de Jack Sholder qui réalisera ensuite le deuxième épisode des aventures de Freddy (A nightmare on Elm Street: Freddy’s revenge_1985) et surtout le désormais classique Hidden_1987 avec Kyle MacLachlan en alien — est une honnête série B un peu fauchée ménageant quelques bonnes petites surprises et qui a acquis avec les années un charme suranné. L’image est granuleuse à souhait tandis que les fringues et les coiffures aérodynamiques des actrices fleurent bon la fin des seventies. Et les meurtres, peu nombreux, sont aussi brutaux que distillés avec soin (l’homme plié en quatre restera dans les annales).
Le scénario également signé Sholder s’inspire discrètement des films alors en vogue et certaines scènes paraissent bien familières à l’amateur d’horreurs en tous genres. Notons le masque de Jason dont se pare « the bleeder », un timide qui a une furieuse tendance à saigner du nez dès lors qu’une envie homicide lui vient et une scène de pillage dans une grande surface qui rappelle les sombres heures de Zombie/Dawn of the dead de George Romero_1078. Sans omettre l’épisode de la baby-sitter un poil chaudasse — personnage indispensable à tout bon slasher qui se respecte — qui connaît comme de bien entendu un funeste destin. Hilarité générale.
Car le généreux humour qui parcoure tout le film (y compris dans sa bande son, si l’on en croit les charmants Chop up your mother, Rock or die ou Insects rule my world éructés par The Sic Fuck) permet de passer un excellent moment.
Le réalisateur n’en oublie pas non plus de privilégier chacun de ses grands fous, et notamment « Fatty » géant obèse pédophile interprété par Erland van Lidth, ténor catcheur dans le civil, en le mettant en présence de la petite fille de la famille harcelée, dans un épisode aussi inquiétant que désopilant.
En définitive, le seul regret est de ne pas profiter un peu plus de l’immense Jack Palance qui, ayant ici l’intelligence de laisser cabotiner ses deux compères Landau et Pleasence, vole allègrement la vedette à tout le casting y compris et surtout au héros interprété par le bien pâle Dwight Schulz, alors en début de carrière.
La fin ouverte et délibérément glauque laisse augurer d’une suite (qui ne fut jamais tournée) et s’achève sur un masque ricanant. Un vrai plaisir vintage.
PS. Film présenté dans le cadre des Pépites de l’étrange lors de L’étrange festival 2011.
Alone in the dark/Dément de Jack Sholder_1982
avec Jack Palance, Martin Landau, Donald Pleasence, Dwight Schultz, Erland van Lidth, Deborah Hedwall, Elizabeth Gracen et Brent Jennings