Festival de palmes [Cannes, les années 40]

© et source : Site Officiel du Festival de Cannes

Palmes, palmes, palmes. Pour fêter le 63ème festival de Cannes, Sandra M. — entre moult activités — a refait les peintures d’In the mood for Cannes et Niko de Filmosphère s’est employé à corriger la longue liste des films récompensés sur la Croisette selon ses goûts et ses couleurs avant de proposer un top 10 des plus belles palmes d’or.

Ed(isdead)* de Nightswimming ayant trouvé l’exercice amusant s’est mis de la partie tout en s’adonnant à de savants calculs, et ce bon Dr Orlof n’a pas tardé à lui emboiter le pas.

Par ailleurs, j’imagine que Vincent d’Inisfree ne tardera pas à être également séduit.

Dans la mesure où il était hors de question que je laisse tous ces braves garçons s’amuser sans moi, à mon tour désormais de me distraire en me lançant à corps perdu dans le jeu du « Et si j’avais été présidente du jury et que mon charisme ébouriffant et ma confondante autorité avaient égaré mes compagnons dans le crime au point de me laisser seule décider des récompenses à distribuer, la face du recensement des palmés en aurait-elle été changée? »

Oui, sans nul doute.

Il va de soi que m’abandonner à ce divertissement ne m’empêchera en aucune façon de reconnaître honnêtement si j’ai — ou pas — vu tous les films en compétition (ayant, par exemple, passé radicalement et vigoureusement mon tour à l’idée de souffrir à la vision de la palme d’or 2009).

1946

Comme on est jamais aussi bien servi que par soi-même, le festival sera présidé de 1946 à 1950 par son fondateur, Georges Huisman.

La palme d’or est alors appelée Grand Prix et ce dernier est décerné à 11 films de nationalité différente, pour ne pas faire de jaloux et travailler à restaurer l’amitié entre les peuples.

11 films dont je n’ai vu que la moitié** : Maria Candelaria d’Emilio Fernandez, Roma citta aperta/Rome ville ouverte de Roberto Rossellini, Brief encounter/Brève rencontre de David Lean, La symphonie pastorale de Jean Delannoy, The lost week-end/Le poison de Billy Wilder. Je ne puis donc juger des qualités de : La terre sera rouge de Bodil Ipsen, Le tournant décisif de Friedrich Ermler, Les hommes sans ailes de Frantisek Cap, La dernière chance de Léopold Lindtberg, L’épreuve d’Alf Sjoberg et La ville basse de Chtan Anand, n’ayant d’ailleurs que peu de chance désormais de les visionner…

A noter que 9 courts métrages furent également récompensés d’un Grand Prix dont Les petits animaux et les brigands/Zvířátka a Petrovští réalisé par Jiri Trnka.

Alors que René Clément — également présent avec son charmant Père tranquille — se voit offrir (justement) Prix de la mise en scène et Grand prix international pour La bataille du rail, sont joyeusement ignorés George Cukor pour Gaslight/Hantise, Charles Vidor et sa Gilda, La belle et la bête de Jean Cocteau et Notorious/Les enchainés d’Alfred Hitchcock.

Et si Ray Milland empoche un prix mérité pour son interprétation d’alcoolique dans Le poison de Billy Wilder (quoique ce diable de Cary Grant l’aurait bien mérité pour son rôle de salaud magnifique dans le Notorious d’Hitchcock), Michèle Morgan, héroïne de La symphonie pastorale de Jean Delannoy, souffle sans vergogne à Anna Magnani la récompense suprême.

Pour réparer l’affront fait à la Magnani , la palme d’or est attribuée ce jour à Roma citta aperta/Rome Ville ouverte de Roberto Rossellini.

© Excelsa Film

1947

9 films vus sur 24 en compétition, inclus les cinq qui se partagent le Grand prix selon leur genre : Dumbo de Ben Sharpsteen (dessin animé), Ziegfield follies de Vincente Minnelli (comédie musicale), Crossfire/Feux croisés d’Edward Dmytryk (film social), Les maudits de René Clément (aventures et policier) et Antoine et Antoinette de Jacques Becker (film psychologique et d’amour).

Antoine et Antoinette de Jacques Becker est certes résolument tendre et charmant (du moins dans mes souvenirs), mais je préfère privilégier les films traitant d’amour vache.

Hors donc, si j’offre sur le champ un prix d’interprétation masculine collectif aux trois Roberts (dans l’ordre) Ryan, Mitchum et Young pour Crossfire d’Edward Dmytryk, la palme d’or est décernée à The strange love of Martha Ivers/L’emprise du crime de Lewis Milestone***, un flamboyant film noir où règne sans partage la vénéneuse Barbara Stanwyck.

© Hal Wallis Productions

1949

En 1949, la sélection officielle compte 29 films (8 vus). The third man/Le troisième homme de Carol Reed remporte le Grand Prix tandis que René Clément est à nouveau récompensé pour la mise en scène d’Au-delà des grilles.Bien que je reconnaisse la puissance de jeu d’Edward G. Robinson, prix d’interprétation pour House of strangers/La maison des étrangers de Joseph L. Mankiewicz, c’est à nouveau Robert Ryan qu’il me plaît de distinguer puisque présent dans deux films formidables, Act of violence de Fred Zinnemann et The set-up/Nous avons gagné ce soir réalisé par Robert Wise et vibrant — bourreau ou victime — d’une sombre humanité.

Quant à Silvana Mangano, son inoubliable apparition dans Riso amaro/Riz amer de Giuseppe de Santis aurait mérité un prix du meilleur espoir féminin, ou à défaut, du meilleur costume (après tout, le décor d’Occupe-toi d’Amélie de Claude Autant-Lara a bien reçu un prix).

Pas de bataille épique en ce qui concerne la palme d’or puisque grâce à Orson Welles, Joseph Cotten, Alida Valli, le trench de Trevor Howard, le chat noir dans la nuit, les pavés mouillés de pluie, l’amitié bafouée, les femmes perdues, le droit d’ingérence, le scénario de Graham Greene, la musique d’Anton Karas, Vienne ville schizophrène et l’implacable gâchis, l’intemporel The third man/Le troisième homme de Carol Reed l’emporte d’un air de cithare sur ses challengers.

© London Film Production

* qui a fort obligeamment fourni le lien INDISPENSABLE pour toutes archives utiles à la bonne marche de cette petite récréation
** Et 16 films sur les 44 que comptait la sélection officielle
**** A noter que le film peut être visionné à l’adresse suivante : The Strange Love of Martha Ivers – A Movie Powder Presentation

A suivre…