Rec de Paco Plaza et Jaume Balaguero

Rec de Paco Plaza et Jaume Balaguero © WildSide

Déjà vu et Même pas peur sont dans un bateau. Remake perverti de Cannibal holocaust de ce brave Ruggero Deodato, la partie de campagne des ethnologues étant remplacée par la jungle des banlieues ibériques, Rec est un petit film d’horreur réalisé par un abruti aux ordres de la présentatrice (Manuela Velasco, parfaitement horripilante) d’un programme télévisé soporifique, prête à tout pour gagner quelques points d’audience, y compris mourir pour un scoop…

Dès le début de l’enregistrement, nous serions ravis de la trucider, l’hystéro arriviste. D’ailleurs, la vision du film ne sera qu’une longue souffrance, taraudés que nous sommes par une simple question : mais quand va-t-elle enfin y passer et définitivement la boucler?

Car il ne faut pas se leurrer, malgré la critique acerbe des émissions de « télé-réalité », ce film n’est qu’un jeu de massacre éhonté. Les personnages y sont tous sacrifiés, les bons (les pompiers, braves gars venus aider la veuve, l’orphelin et les vieilles dames indignes, qui se retrouvent – rires nerveux du spectateur qui compatit – à tabasser des hordes de zombis affamés), les brutes (la police et les médecins dépêchés par le gouvernement qui se retrouvent eux aussi séparés du monde extérieur et victimes expiatoires d’un virus qui n’a pas encore livré son secret) et les exploiteurs de tout poil.

Quand la fête commence, eh bien il est temps de faire le décompte des « emprunts », des « hommages » et de tenter de se débarrasser de cette damnée sensation de « déjà vu et en bien mieux »… Et pour établir combien l’ambition cinématographique de certains atteint allègrement le degré zéro, il suffit d’apprendre qu’un remake est déjà en cours de production aux États-Unis. Au secours !

Manifestement ravis de leur (seule et unique) idée de départ, les réalisateurs – autrefois plus subtils (Les enfants d’Abraham de Plaza, voire Darkness de Balaguero, distillaient une sourde anxiété nettement plus flippante) – pillent leurs prédécesseurs et évoquent tour à tour Night of the living dead de George Romero (avec le personnage de la petite fille dont on se doute bien qu’elle va finir par croquer sa génitrice, la gamine virant quasiment au noir et blanc), Shivers et Rabid de David Cronenberg, The descent de Neil Marshall (pour les monstres albinos) et bien sûr, The Blair witch project d’Eduardo Sanchez et Daniel Myrick, pour le filmage du grand n’importe quoi n’importe comment… Un plan est à la limite de la provocation – pastiche involontaire ? Pour un peu, on se croirait devant le Scary movie des frères Wayans – l’acolyte armé de sa caméra filmant brusquement sa collègue dans les trous de nez, on attend avec angoisse que la goutte lui vienne… Le suspense est à son comble ! Notre impatience aussi…

Au final, là où Plaza et Balaguero excellent, c’est dans le portrait horrifique qu’ils dressent du petit monde infect du voisinage… des gens ordinaires, racistes, médiocres, visqueux, petits-bourgeois, haineux, égoïstes, inquisiteurs, vous, moi, ceux d’en face… en bref, sauve qui peut !

© Wild Side

Rec de Paco Plaza et Jaume Balaguero_2008
avec Manuela Velasco, Ferran Terraza, Yorge Yamam et Carlos Lasarte